Projection du documentaire "Operacion Diablo",

à la Bibliothèque Multimédia du Grand-Guéret

les art-terriens,vendredi 17 décembre 2014,


 

Le documentaire "L'Opération Diablo"

sera projeté dans le cadre de l'exposition "Du Divers au Même",

à la Bibliothèque Multimédia du Grand-Guéret,

le mardi 21 janvier à 18h15,

en partenariat avec la BM du Grand-Guyéret et le Cinéma Le Sénéchal.


Depuis notre retour du voyage autour du monde, nous souhaitions diffuser le travail de Stéphanie Boyd, la réalisatrice de ce film, en France. Nous sommes donc ravis et fiers de faire venir "L'Opération Diablo" directement du Pérou, pour une de ses premières diffusion, sinon la première, en France.

Stéphanie, nous l'avions rencontrée au Pérou en 2008, lors de notre voyage autour du monde. Nous parlons de cette rencontre dans notre livre "Au Cœur des Hommes", dont nous vous offrons l'extrait :

 

"Viva Tambogrande !


Parfois, les rencontres et les coïncidences donnent au monde une note de proximité. En janvier 2007, alors que nous sommes en Inde, nous participons à un rassemblement de la branche indienne du SCI (Service Civil International). Un militant de New Delhi propose à l’assistance une réflexion sur le thème de la non-violence, en s’appuyant sur un film documentaire qui retrace la lutte d’un village péruvien contre le projet d’implantation d’une mine d’or à ciel ouvert à la place de ses rues et de ses champs.

 

L’histoire du village de Tambogrande commence au milieu du 19ème siècle avec des pionniers qui transforment, à la force de leurs mains, un désert en région fertile, en aménageant tout un réseau d’irrigation. Ils commencent à cultiver mangues, citrons et autres fruits et l’agriculture devient l’activité principale de la région. En 1979, l’Etat péruvien déclare de nécessité nationale l’exploration et l’exploitation minière d’une partie du district de Tambogrande. La découverte de gisements d’or autour du village devient une menace puisqu’une entreprise canadienne projette d’exploiter le minerai en installant une mine à ciel ouvert. Elle obtient l’autorisation d’exploitation de la part de l’Etat en 1998. La population rejette ce projet qui impliquerait la destruction de nombreuses cultures ainsi que le déplacement d’une bonne partie de la population. Mais selon la loi du pays, l’état est propriétaire du sous-sol tandis que les habitants seulement de la superficie. Comme l’Etat soutient la mine, son installation débute au cours de l’année 1999.


La lutte contre l’implantation de la mine passe d’abord par une période violente où les villageois détruisent des installations de l’entreprise. Les médias tournent les faits à leur manière et les habitants, qui défendent pourtant leurs vies, passent auprès de la population pour des délinquants et des terroristes. Un des meneurs du mouvement est assassiné dans ses champs, ce qui marque les esprits. Le souvenir de Godofredo agit comme une motivation qui unit l’ensemble des habitants dans le sens d’une lutte ferme et non-violente. Celle-ci se mène sur différents plans. Le plan juridique permet de reconnaître officiellement le désastre humain, écologique et économique que provoque l’implantation de la mine dans la région. Des campagnes d’information permettent de donner une ampleur internationale au mouvement et de recevoir des soutiens de la capitale et de différents pays. Des marches et des évènements culturels célébrant l’agriculture nourrissent la détermination des villageois tandis que leur aspect festif entretient le bon esprit et la motivation générale. La lutte dure plusieurs années et le 7 février 2005, la société minière canadienne annonce finalement son retrait du Pérou. Ce succès historique de petits villageois contre une énorme industrie soutenue par l’Etat est un exemple fort de l’efficacité d’un mouvement populaire non-violent. Bien sûr, la lutte n’est pas gagnée pour toujours car les entreprises minières restent sur le qui-vive et profiteront dès que possible d’une conjoncture politique favorable pour revenir à la charge.

Quand nous entrons au Pérou, nous n’avons pas encore de carte routière, et avançons un peu à l’aveuglette. Alors que nous conduisons tranquillement sur une route du nord du pays, nous lisons sur l’arche qui surplombe l’entrée d’un village : Tambogrande ! Incroyable, nous sommes à Tambogrande ! Une étape à la bibliothèque nous permet d’approfondir un peu nos connaissances, mais nous ne parvenons pas à rencontrer d’acteurs de la lutte. Quelques jours plus tard, alors que nous avons rejoint la capitale régionale, Piura, nous rencontrons quelques personnes qui se sont impliquées dans le mouvement de Tambogrande. Au cours d’une discussion, Nelson nous donne des informations supplémentaires, et quand nous lui parlons du reportage, il nous répond qu’il est très ami avec la coréalisatrice et peut nous mettre en contact avec elle. Quelle chance !


C’est ainsi que nous rencontrons Stephanie lors de notre passage à Cusco. Stéphanie est canadienne, et vit au Pérou depuis onze ans. Tout d’abord journaliste pour des périodiques plutôt engagés, elle se consacre finalement au cinéma et aux films reportages retraçant des luttes pour la justice sociale. Elle nous parle de son travail. Suite à une nouvelle sur le problème de Tambogrande dans un journal national, elle et son coréalisateur décident de se rendre sur place et de suivre la lutte en prenant des images vidéo et en faisant des entrevues. Ils s’installent alors dans la région de Piura pendant quatre ans. Stéphanie nous raconte qu’au début, il leur est difficile de gagner la confiance des habitants, qui se méfient d’une quelconque infiltration au profit de la mine. La seule manière de montrer patte blanche est de s’engager dans le mouvement en mettant leurs compétences à son service. Stéphanie nous explique que la société minière envoie des dépêches mensongères à la presse internationale. Elle se charge alors de traduire en direct ces fausses informations pour que les villageois en prennent connaissance et puissent répondre pour rétablir la vérité. Le film-reportage « Tambogrande, Mangues, Mort, Mines » sort en 2006, autoproduit par l’association Guarango. L’objectif de cette association est de produire des reportages sur des luttes pour la justice sociale qui se tiennent au Pérou.


Avant le film de Tambogrande, Stéphanie et son collègue ont déjà sorti un film nommé « Choropampa, le prix de l’or ». Un camion de l’entreprise RANSA, gérant la plus grande mine d’or du monde déverse du mercure sur plus de 40 kilomètres d’une route du nord du Pérou. Cette route traverse Choropampa et deux autres villages. Le village de Choropampa est contaminé par le métal lourd et plus de 1000 personnes ont des troubles médicaux importants. Un jeune maire courageux est élu et mène le village sur la voie de la lutte nonviolente pour obtenir des réparations de la part de la mine.

Ils travaillent actuellement sur un autre reportage, « Opération Diablo » qui retrace une nouvelle lutte entre la population et l’industrie minière. Un prêtre mène une lutte non-violente avec les habitants pour protéger leur village des intérêts dévastateurs d’une mine. Au cours du tournage qui dure depuis huit ans, se découvre une énorme opération d’espionnage. Le prêtre, surnommé « El Diablo », et les nombreux activistes, sont surveillés jour et nuit par une société privée de sécurité mandatée par la société minière.

 

 

Stéphanie nous explique que les agents secrets d’espionnage et de répression de la dictature de Fujimori ont monté leurs propres négoces quand celui-ci a perdu le pouvoir. Les entreprises font maintenant directement appel à ces nouvelles sociétés de sécurité pour éliminer leurs opposants. On assiste, selon Stéphanie, à une privatisation de la dictature qui passe ainsi directement aux mains des grandes entreprises transnationales. Au cours de nos rencontres, de nombreux péruviens dénoncent les entreprises étrangères qui viennent s’installer dans leur pays, appuyées par le gouvernement. Ils nous expliquent qu’elles exploitent les richesses du pays, que ce soit l’agriculture ou les mines, et que toute cette richesse s’en va directement à l’étranger sans que la population n’en profite. Dans leurs paroles, nous notons de la tristesse mélangée à de la révolte. Ils décrivent leur sensation de se faire piller, trahis par la corruption de leurs dirigeants politiques.

Pour en revenir aux films-reportages, nous trouvons très intéressant du travail de Stéphanie qu’elle suive les mouvements et construise sa production alors qu’elle ne connait pas encore l’issue du conflit. Au cours de ses prises de vue et de ses tournages, elle ne sait pas ce qui l’attend. Ses reportages nous entraînent de ce fait au cœur des mouvements citoyens que nous avons du coup l’impression de vivre en direct.

Nous voulons à travers cette brève partager avec vous deux histoires qui imposent selon nous le respect. Tout d’abord l’histoire des habitants de Tambogrande, qui ont réussi à transformer leur indignation et leur révolte en mouvement non-violent très construit et ainsi triompher devant la grande industrie minière appuyée par le gouvernement corrompu. Ils donnent ainsi aux réprimés du monde un grand espoir. Ensuite, l’histoire de Stéphanie, qui a su mettre sa passion cinématographique au service de la justice sociale et de l’Humanité.

En bref, tout est possible… à nous de jouer. "

(article écrit au Pérou en 2008, extrait de Au Coeur des Hommes, Par ailleurs Ed. 2010)


Rendez-vous donc mardi 21 janvier 2014, à 18h15, pour en parler de vive voix...

 

 

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